Ceux qui connaissent mon parcours savent que j’ai été infirmière à l’Assistance Publique, dans un hôpital parisien.
Nous étions, à l’époque, un service de pointe en matière de chirurgie cardiaque infantile.
Ce préambule, je l’écris de façon à ce que les lecteurs comprennent que je suis un pur produit du service public et ayant travaillé dans un hôpital universitaire, j’ai certes été confrontée à quelques erreurs, mais j’ai surtout pu vivre au quotidien un hôpital public proposant des soins de très bonne qualité.
Je suis sans doute, du fait de cette carrière passée, devenue un peu plus difficile que le commun des mortels quant à la qualité des soins qui sont proposés et dispensés, et également sur l’accueil que l’on peut recevoir dans différentes structures médicales ou paramédicales.
Cet article est le premier d’une liste de quelques-uns traitant d’une médecine qu’il me faudra bien qualifier de médecine de riches.
Jusqu’alors, je n’ai jamais réellement pris conscience que, dans ce pays, nous allions petit à petit, vers une médecine à deux vitesses.
Le problème est que les pouvoirs publics sont certes responsables de cet état de fait, mais, et cela est nettement plus grave, les médecins privés ainsi que les hôpitaux privés vont vers des déviances pour le moins inquiétantes.
Puisqu’il faut bien commencer par quelque chose, je vais aujourd’hui vous raconter une histoire toute fraîche.
Elle est de première main, puisqu’elle m’est arrivée personnellement il y a deux semaines.
Vous le savez, j’habite en région parisienne, en banlieue sud.
Je suis confrontée à un problème de diabète depuis environ un an. Les endocrinologues sont relativement peu nombreux. J’ai été suivie par l’une d’entre elles pendant quelque temps pour un problème de thyroïde, mais il s’est avéré que cette dame focalisait bien plus sur ce qu’elle écrivait sur son ordinateur que sur ce que pouvait lui dire son patient. En deux mots comme en cent, je n’avais qu’une confiance très réduite.
J’en ai donc essayé une autre un peu plus éloignée géographiquement, qui au bout de 10 mois n’a pas réussi à équilibrer mon diabète.
Non pas que je souhaite exiger d’elle une obligation de résultat, mais force m’est de constater, que le problème fut réglé par un traitement approprié en 15 jours dans la clinique de « gros ».
Cette clinique se trouvant à plus d’une demi-heure de voiture de chez moi, je me suis dit qu’afin de faire simple, l’idéal serait d’aller à la diabétologue que je n’avais pas encore rencontrée à cinq minutes de chez moi.
Rendez-vous est pris (par un secrétariat extérieur au cabinet), le jour du rendez-vous la secrétaire est quasi dans l’incapacité de m’expliquer très exactement comment l’on se rend au cabinet. Et jusqu’à preuve du contraire, cette dame ne faisant pas partie des curiosités touristiques du coin, l’accès à son cabinet n’est pas mentionné sur mon GPS.
Après avoir enfin trouvé, je sonne à l’interphone, on me répond, on ouvre la porte. Je monte au premier étage, je sonne à la porte, j’entre dans la salle d’attente et m’y assoie.
Environ cinq minutes plus tard, une femme blonde d’une bonne quarantaine d’années me demande de rentrer dans son cabinet en m’interpellant ainsi :
- il faut sonner à l’interphone si vous voulez que je vous ouvre
- oui, je comprends, c’est d’ailleurs ce que j’ai fait
- non, absolument pas, c’est faux, vous n’avez pas sonné
- je suis désolée de vous contrarier Madame mais j’ai effectivement sonné…
- Bon, l’interphone est encore en panne, conclut-elle sur un ton très agacé…
Je vais pour m’asseoir sur une des deux chaises en face du bureau. Elle ne l’interdit d’un geste en me demandant de m’asseoir sur l’autre chaise se trouvant très exactement à 40 cm de l’autre sur la droite…. Ne me demandez pas pourquoi, je n’en ai strictement aucune idée…
Elle commence par m’interroger, nom, prénom, date de naissance, trois secondes plus tard mon âge ( ???), adresse, numéro de téléphone ,profession. Elle tilte immédiatement sur le mot invalidité qui semble ne pas lui convenir.
Je lui fait savoir qu’on m’a retiré un excédent au niveau de la thyroïde alors que j’avais 12 ans, elle me toise et me dit :
- La thyroïde entière ou un lobe ?
- A l’époque, on m’a dit que l’on ne m’avait enlevé que le strict nécessaire et il m’a toujours été dit que mes reliquats thyroïdiens étaient strictement normaux
- Ça ne se passe pas comme ça, me répond-elle plus que vertement
Devant le ton à la limite de l’agressivité qui est employé depuis le début de la consultation, je reste extrêmement dubitative. Mais je me contente, dans l’immédiat, de répondre le plus calmement possible aux diverses interrogations.
Elle a en main la lettre de mon médecin traitant. Je lui explique qu’il ne désire pas prendre ce diabète en charge car il est très loin (Orléans).
À partir de là que va suivre un dialogue totalement surréaliste, elle me regarde et me dit
- Que les choses soient claires, je suis endocrinologue, je ne soigne pas les cors au pied
- Je ne pense pas que qui que ce soit vous l’ai demandé, je viens vous voir pour un problème de diabète.
- Je ne comprends pas que votre médecin traitant soit loin.
- Je pense être tout à fait libre de choisir mon médecin traitant et jusqu’à preuve du contraire le fait qu’il soit éloigné de mon lieu d’habitation ne regarde que moi.
- En tout cas, je le répète, je me soigne pas les cors au pied, je suis une spécialiste.
Est-il utile, en l’état, de vous préciser que mon humeur, au vu du ton employé, tournait de plus en plus rouge ?
Ma réponse fut celle-ci :
- Nous allons gagner du temps Mme, non seulement vous ne soignerez pas mes cors au pied, mais j’irai également soigner mon diabète ailleurs. Dites-moi combien je vous dois et restons-en là
- 95 euros me répond-elle
- Pardon ?
- 95 euros
- Et à ce prix-là on n’a même pas le droit à quelqu’un de courtois et poli ???
- Mais, Madame, j’ai été tout à fait correcte
- Avez-vous conscience du ton que vous employez avec moi depuis le début de ce RDV ?
- …
- Il est vraiment préférable d’en rester là, sachez, cependant, que je n’ai jamais été aussi mal reçue par un médecin, et le tout pour 95 euros, dont, soit dit en passant, je n’ai pas été mise au courant lors de la prise de rendez-vous.
Je l’ai juste vu déchirer rageusement la lettre de mon médecin traitant avant de sortir …
Je vous rassure, le chèque, lui, a été encaissé ….
Je me suis retrouvée sur le trottoir, dans une colère noire.
Je ne peux pas comprendre qu’un médecin ayant prêté serment un jour puisse recevoir un patient de cette manière, nonobstant le tarif plus que substantiel.
Mes prochains articles traiteront d’un autre problème de la médecine actuelle.
C’est-à-dire la prise en charge des malades CMU dans des cabinets privés. Il est paraît-il de bon ton d’avertir la secrétaire du praticien que l’on est bénéficiaire du CMU en prenant rendez-vous. Les médecins par contre ne se sentent nullement obligés de faire connaître, pour information, les tarifs qu’ils pratiquent lors de la prise de rendez-vous et se permettent donc de mettre leurs patients devant le fait accompli.
Que cette praticienne estime la qualité de son travail à 95 € le quart d’heure, pourquoi pas, mais, j’aimerais pouvoir librement accepter ce type d’honoraires en étant prévenue d’avance.
D’évidence, je n’aurais pas perdu mon temps à l’ennuyer, puisque j’aurais refusé de me rendre à une consultation aussi onéreuse, non pas
Parce qu’elle engage mes deniers personnels, mais parce que j’estime que je n’ai pas à faire supporter à ma mutuelle, qui me rembourse la totalité des frais (moyennant des cotisations sans cesse plus élevées), des dépenses aussi excessives.
Ce genre de praticiens ne fait pas la gloire de sa profession.