Samedi 19 mai 2007
La nuit a été courte, je sors du lit à contre cœur. Le petit déjeuner, le trajet en voiture, la vue du haut de la route et le sommeil est définitivement chassé.
Nous partons sur le joli bateau blanc, les blocs solidement attachés sur les cotés. Le captain navigue lentement dans le lagon, il en connaît chaque pierre, chaque creux, chaque bosse, nous arrivons au lieu dit : l’aquarium.
Je descends à une profondeur de 6 mètres environ. L’eau est encore un peu turpide après le passage des hautes vagues meurtrières, cinq personnes sont mortes, il y a quelques jours lors d’un raz de marée venu de loin, grosses vagues de l’Antarctique qui font toucher du doigt le fameux réchauffement qui, il serait temps, commence à être pris au sérieux.Je me rends vers l’extrémité de l’aquarium pour descendre dans le canyon. Je m’attends à être aspirée par le courrant mais ce matin il est moindre. La descente est plutôt tranquille. Est-ce cette absence de courrant, mais les lieux pourtant si familiers à mes souvenirs ne sont pas exactement conformes ? Je continue la descente jusqu’à 11 mètres.
Je lève les yeux, les imaginant, là, énormes masses sombres et fantomatiques, je ne vois que les parois abruptes et déchiquetées qui se détachent du soleil. Aucun mot ne saurait décrire cette sensation d’ailleurs que l’on éprouve à cet instant. Les carangues ignobilis ne sont pas là, me montrant s’il était nécessaire que tout ce qui touche à l’océan est imprévisible, sauvage. Les chercher des yeux toute la plongée sans jamais savoir si ou quand on les verra, c’est un plaisir en soi. Ici, bas, rien ne se réclame, voir tous ces poissons est un miracle renouvelé qui s’offre à mes yeux d’enfants. Adultes blasés s’abstenir, je déteste ces plongeurs trop surs d’eux qui peuvent vous décrire au rocher près chaque site, y plaçant chaque poisson comme une obligation. Le charme de la plongée réside dans la possible absence de résultat, ce qui rend chaque rencontre magique, extraordinaire au sens littéral du terme. Je reprends mes marques, les vieilles habitudes, je me réapproprie mon matériel et je savoure d’être, là, dans l’eau, bien, l’esprit vide, ne se remplissant que de ce que le regard lui offre. Je voyage dans le voyage, dans un monde où je ne suis qu’une intruse tolérée. Je n’ai que bien peu de maîtrise sur la suite de ce voyage, j’emmagasine chaque image avec bonheur, la considérant comme unique. J’essaie de la partager, de vous la transmettre, exercice difficile mais ô combien délicieux.
Puissiez vous vous être fait bercer par la vague.
Maintenant, remontons ensemble.